Comment j’ai appris à être un aidant pour une personne atteinte d’un cancer

Par Cameron Von St-James

Après avoir reçu son diagnostic de mésothéliome, ma femme disait souvent qu’elle ne pouvait imaginer ce que je traversais en tant que son mari et aidant. Je me rends compte  maintenant que mon histoire pourrait aider ceux qui luttent actuellement contre le cancer et je voulais partager mon point de vue avec eux.

Notre fille, Lily, est née seulement trois mois avant le diagnostic d’Heather. Notre  vie était remplie de joie et d’excitation à la pensée des surprises que l’avenir réservait à notre nouvelle famille. Sauf que tout ce bonheur allait nous être arraché en un instant seulement trois mois plus tard. Je me souviens de mes sentiments après son diagnostic : j’étais envahi par l’incertitude et la peur. Heather pleurait et moi, je ne pouvais m’imaginer comment nous allions passer au travers de cette épreuve.

Je me rappelle m’être senti si accablé dans les instants qui ont suivi. Je voulais m’effondrer et pleurer. La seule chose qui m’a ramené à la réalité, ce sont les questions du médecin. Bien que j’aie été bouleversé, j’ai compris que je devais encore prendre des décisions de vie ou de mort avec ma femme.

Immédiatement après le diagnostic, j’ai eu des émotions très variées, allant de la peur à la colère, en passant par la fureur. Parce que je ne savais pas comment contrôler ma colère, je proférais souvent des blasphèmes et je m’en prenais aux autres pour tenter d’extérioriser mes émotions. Cependant, j’ai vite compris que ma femme avait besoin que je sois fort et que de m’en prendre aux autres ne pouvait que causer plus de torts. Ultimement, j’ai appris à mieux contenir mes émotions et à les maintenir sous contrôle. Il était important qu’ Heather  me voie comme une source d’optimisme et de stabilité et à partir de ce moment-là, c’est tout ce que j’ai essayé d’être.

Après le diagnostic, il y a eu beaucoup de journées durant lesquelles j’avais une longue liste de tâches à accomplir et j’étais débordé. Je devais travailler, prendre des dispositions de transport pour les rendez-vous chez le médecin, m’occuper de notre fille, de nos animaux de compagnie et de la maison; la liste de tâches n’en finissait plus. Je ne savais pas comment j’arriverais à tout faire. J’ai dû apprendre à établir mes priorités et une routine. Mais le plus important, ç’a été d’apprendre à demander de l’aide. Nous étions tellement chanceux d’avoir de nombreux amis et membres de la famille qui étaient tous disposés et intéressés à faire tout ce qu’ils pouvaient pour nous aider, mais il m’a fallu longtemps pour accepter leurs offres généreuses, car je croyais pouvoir tout faire seul. Cependant, une fois que j’ai eu  finalement accepté leur aide, j’ai été soulagé d’un lourd fardeau et je serai toujours reconnaissant envers chacune des personnes qui nous ont tendu la main en ces moments difficiles.

La période la plus pénible pour moi a été de loin les deux mois qui ont suivi la chirurgie d’Heather à Boston. Heather a subi une chirurgie importante appelée pneumonectomie extrapleurale et nous avons envoyé Lily chez les parents d’Heather dans le Dakota du Sud pendant l’opération. Dès qu’elle fut en assez bonne santé pour voyager, Heather a quitté Boston pour rejoindre Lily chez ses parents, alors que je retournais à la maison pour continuer à travailler. Heather avait besoin de soins assidus lors de sa convalescence et nous savions tous les deux que j’aurais été incapable de m’occuper d’elle et de Lily tout en travaillant à temps plein pour subvenir à nos besoins. Nous avons donc pris la bouleversante décision d’être séparés pour les deux prochains mois pendant qu’Heather récupérerait et se préparerait pour la chimiothérapie et la radiothérapie. Au cours de ces deux mois, je n’ai vu ma famille qu’une seule fois.

Elles me manquaient tellement qu’un vendredi soir après le travail, j’ai conduit 11 heures pendant une grosse tempête de neige. J’ai même dû me garer sur le côté de la route et dormir quelques heures pendant que les chasse-neige faisaient de leur mieux pour frayer un chemin. Lorsque je suis arrivé, j’ai profité pleinement des 24 heures que j’avais pour passer du temps avec ma famille avant de devoir retourner à la maison pour aller travailler le lundi matin. Ç’a été un voyage exténuant pour passer quelques précieuses heures avec elles, mais chaque seconde en valait la peine.

J’ai appris beaucoup de choses pendant cette période. J’ai appris à contrôler mes émotions et à accepter l’aide des gens. Enfin, j’ai appris à ne jamais regretter ou anticiper les décisions bouleversantes que le cancer nous oblige à prendre. En fait, nous avons appris à nous rassurer grâce à ces décisions,  aussi bouleversantes furent-elles, car elles nous donnaient parfois un peu de contrôle sur une situation qui semblait souvent complètement hors de notre contrôle. Je suis heureux de vous dire que ma femme est toujours en bonne santé plus de 6 ans après cette épreuve et j’espère que mon expérience sera une source d’inspiration pour tous ceux qui luttent contre le cancer.