Avant la COVID-19, si vous alliez voir un médecin ou un spécialiste, ça signifiait normalement que vous le voyiez en personne. Aujourd’hui, cela signifie typiquement que vous le contactez par téléphone ou lors d’un appel vidéo. Bien que la plupart des patients atteints du cancer et des proches aidants soient d’accord avec les moyens de contact alternatifs, quelques-uns les trouvent inadéquats, selon un sondage récent, mené pour le Réseau canadien des survivants du cancer par la firme Léger. Quelques patients sont préoccupés par le manque d’examens physiques, tandis que d’autres patients trouvent que les interactions téléphoniques ou par vidéo sont un moyen de communication moins rassurant ou moins efficace.
Le sondage a été mené par Léger au nom du RCSC entre le 22 mai et le 10 juin. Les patients atteints du cancer, les proches aidants et les patients qui attendent un diagnostic ont été interrogés sur la manière dont la perturbation des soins oncologiques causés par la COVID-19 les a affectés, ainsi que sur leurs craintes et leurs préoccupations concernant les soins oncologiques pendant la pandémie.
Bien que les appels vidéo soient devenus très populaires en général pendant la pandémie, les appels téléphoniques semblent plus importants pour les soins oncologiques. La plupart des répondants qui ont eu un contact avec un prestataire de soins de santé pendant la pandémie de la COVID-19 l’ont fait par téléphone. Un plus faible pourcentage a vu un prestataire de soins de santé en personne, soit de 30% à 40% selon la spécialité du médecin. Ils sont encore moins nombreux à avoir eu des rendez-vous par appel vidéo ou à avoir communiqué par courriel, par messagerie instantanée ou par un message texte.
Les appels téléphoniques ont l’avantage de la simplicité, de la fiabilité et de la familiarité, spécifiquement pour les personnes âgées qui ne sont pas forcément à l’aise avec l’informatique ou n’ont peut-être même pas d’appareil capable de faire des appels vidéo. (Les participants au sondage étaient plutôt âgés : 53 % étaient âgés de 65 ans ou plus, et 23 % avaient entre 55 et 64 ans.)
Dans l’ensemble, les patients et les proches aidants semblent à l’aise avec le changement des rendez-vous en personne pour des rendez-vous par téléphone. Presque tous les répondants au sondage qui avaient parlé au téléphone avec un prestataire de soins de santé ont dit qu’ils étaient satisfaits de l’interaction. Quant aux patients atteints du cancer, ils sont à peine moins nombreux à être satisfaits de parler au téléphone avec leur médecin plutôt que de le rencontrer en personne. Les proches aidants, bien qu’ils soient encore majoritaires, sont moins nombreux que les patients à être satisfaits de leurs rendez-vous et leurs conversations téléphoniques.
En revanche, quelques patients se sentent mal à l’aise quand ils communiquent par téléphone ou par vidéo. Carol, un patient atteint de plusieurs cancers du stade 4 en Ontario, a dit : « Je trouve que les conversations téléphoniques sont difficiles, les appels vidéo sont mieux, mais ne sont pas optimales. Les rendez-vous en personne me manquent beaucoup. Le langage corporel et la capacité de lire entre les lignes sont si importants. »
Un autre patient atteint du cancer de la thyroïde de stade 1, a trouvé que les conversations téléphoniques, bien que plus sûres, « ne sont pas très efficaces pour communiquer les symptômes et examiner les changements de santé. » Moins de patients ont utilisé les courriels comme principal mode de contact avec leurs prestataires de soins de santé. « Le contact personnel avec mon oncologue me manque vraiment, » a écrit un patient atteint du lymphome en Colombie-Britannique. « Les sujets abordés au cours d’une conversation sont utiles et apaisants. Je n’ai pas vu mon oncologue depuis quatre ou cinq mois et je ne communique que par courriel. Je me sens un peu dans le brouillard. »
Les autres patients soulignent qu’il n’y a parfois rien de tel que d’avoir un médecin qui regarde votre corps avec ses propres yeux. Quelques patients sont anxieux que des anomalies qui auraient été détectées par un examen physique n’aient pas été détectées lors des rendez-vous téléphoniques ou virtuels – des signes indiquant qu’un cancer actif s’aggrave ou qu’un cancer en rémission commence à récidiver.
Hilde, une patiente atteinte du cancer de l’anus en rémission en Ontario, a expérimenté cette anxiété: « J’ai eu un rendez-vous virtuel avec mon radio-oncologue. Cela a accru mon anxiété parce que je n’ai pas pu subir d’examens physiques. Au fil des jours, je ressens une anxiété proche de la crise de panique en pensant que je pourrais avoir une récidive qui est passée inaperçue à cause du rendez-vous virtuel… Avant la COVID, j’avais l’impression d’être beaucoup mieux soignée. »
Le pourcentage de répondants satisfaits des interactions qui ne sont pas en personne avec des prestataires de soins
Pourcentage de satisfaction | ||||
Mode de communication | Type de médecin | Patients | Proches aidants | Patients qui attendent pour un diagnostic |
Par téléphone | Un omnipraticien | 90 % | 74 % | 80 % |
Un hémato-oncologue | 93 % | 81 % | 40 % * | |
Un urologue | 92 % | 76 % * | 100 % * | |
En personne | Un omnipraticien | 89 % | 81 % | 92 % |
Un hémato-oncologue | 96 % | 100 % | 100 % | |
Un urologue | 88 % | 100 % | 63 % | |
Par vidéo | Un omnipraticien | 70 % | 81 % | 70 % |
Un hémato-oncologue | 85 % | 75 % | 60 % * | |
Un urologue | 57 % | 67 % * | 83 % * |
*Faible taille de l’échantillon (moins de 30 personnes)
Il faut noter que, dans l’ensemble, beaucoup moins de répondants étaient mécontents de l’absence de rendez-vous en personne que préoccupés par le risque de contracter la COVID-19 dans un hôpital (ou que leur proche la contracte, dans le cas des proches aidants). Quelques proches aidants ont même exprimé leur soulagement de ne pas avoir à emmener la personne dont ils s’occupent à l’hôpital, parce que des rendez-vous téléphoniques ou virtuels étaient disponibles.
Les proches aidants qui ont répondu au sondage semblent avoir une préférence faible, mais significative pour les rendez-vous en personne au lieu des appels téléphoniques. Pour certains proches aidants, c’est parce qu’ils savent que la personne dont ils s’occupent compte sur eux pour assurer la liaison avec le personnel médical. Un proche aidant pour une personne atteinte du cancer du côlon de stade 3 et du cancer colorectal en Alberta a dit : « J’ai été empêché d’assister aux rendez-vous en personne. Cette situation est préoccupante, parce que le patient n’est pas en mesure de comprendre ou de se souvenir des informations/instructions données lors du rendez-vous. Lorsqu’une personne est stressée, elle se souvient moins bien. »
Les autres proches aidants, même s’ils préfèrent des rendez-vous en personne, sont contents que la personne dont ils s’occupent soit toujours en contact avec les médecins, même si c’est par d’autres moyens, parce qu’ils craignaient que les rendez-vous soient entièrement annulés.
Comme les proches aidants, plus de patients qui attendent un diagnostic étaient satisfaits des interactions en personne avec leur médecin qu’avec des interactions téléphoniques. Les patients qui attendent un diagnostic étaient significativement plus nombreux que les patients atteints du cancer à déclarer qu’ils se sentaient plus craintifs et plus anxieux, tant en général qu’à propos de leur éventuel cancer.
En général, le sondage montre que la manière dont les médecins interagissent avec les patients et les proches aidants a un impact considérable sur leur santé mentale et émotionnelle et sur leur perception des soins qu’ils reçoivent. Il est important que les professionnels de la santé soient conscients de ces préoccupations et de ces angoisses, parce que les méthodes non traditionnelles de prise de rendez-vous et d’interaction avec les médecins deviennent plus courantes, pendant et après la COVID-19.